Comment la crise des Gilets Jaunes profite au Livret A

Voilà un effet collatéral du mouvement des Gilets Jaunes auquel on ne s'attendait pas. En janvier, les épargnants ont versé 4 milliards d'euros sur leur Livret A, une collecte record depuis six ans. La baisse de la consommation a profité au placement préféré des Français, mais aussi le nouveau mode de prélèvement de l'impôt sur le revenu.

Janvier, mois fort pour l'épargne

Traditionnellement, le début d'année est bénéfique à l'épargne. Après les fêtes de fin d'année et les primes de décembre, les Français ont l'habitude de thésauriser en janvier. Le millésime 2019 confirme la tendance, mais cette fois elle prend des proportions quasiment inégalées. Les épargnants ont versé 4 milliards d'euros sur le Livret A et 730 millions d'€ sur le Livret de Développement Durable et Solidaire (LDDS), un niveau record depuis 2013, année où l'Etat avait décidé de relever le plafond du Livret A à 22 950€. Cette année, le contexte favorise ce phénomène, les raisons étant à la fois structurelles et conjoncturelles.

Effet Gilets Jaunes et prélèvement d'impôt à la source

Ce qui n'aura pas profité à l'économie aura été bénéfique à l'épargne. Les centres-villes étant devenus inaccessibles par le blocage des Gilets Jaunes, les Français ont moins dépensé dans les magasins et les grandes enseignes, ce qui a permis d'augmenter leur capacité d'épargne. Celle-ci a également gonflé avec le versement des primes "Macron", ces primes exceptionnelles au pouvoir d'achat qui trouvent elles aussi leur origine dans le mouvement des Gilets Jaunes. Le 10 décembre, alors que le phénomène était à son apogée, le président de la République appelle les entreprises à verser une prime de fin d'année à leurs employés, un bonus exonéré d'impôt et de charges sociales jusqu'à 1 000€. Entre 4 et 5 millions de salariés auraient été concernés. En janvier, une centaine de grandes et moyennes entreprises ont versé des primes à 1,5 million de personnes pour un montant moyen entre 500 et 600€.

Un autre facteur a joué en faveur du Livret A : le prélèvement à la source. Les contribuables qui ont reçu les réductions d'impôt de manière anticipée à la mi-janvier en ont affecté une partie sur leur Livret A.

Le Livret A a 200 ans !

En 2018, le produit d'épargne préféré des Français a fêté ses 200 ans et montre une fois de plus sa résilience, pénalisé par un rendement au plancher à 0,75% depuis août 2015. Avec une inflation à 1,8% sur un an, la rémunération réelle du Livret A est négative ! Pourtant, la collecte a été soutenue jusqu'en août, avant de décroître en septembre et octobre. Les mois de novembre et décembre ont redressé la barre sous l'effet du versement des primes et des étrennes. Le contexte social et économique instable a incité les Français à augmenter leur épargne de précaution : au troisième trimestre, le taux d'épargne a atteint 15,6% du revenu disponible brut. Avec un encours de près de 284 milliards d'€, le Livret A détient un nouveau record.

Les Français moins pessimistes sur leur situation financière

Chaque mois, l'Insee interroge les Français sur des questions qui touchent à l'emploi, l'épargne, les finances. Ce qui permet à l'institut de calculer l'indice de confiance des ménages. En février, cet indicateur rebondit, passant de 86 (décembre) à 95 points. C'est notamment le solde d'opinion concernant l'opportunité d'épargne qui s'améliore, après être tombé dans le rouge en décembre et janvier. 51% des Français estiment que c'est le bon moment d'épargner. Les chiffres de l'Insee sont donc en phase avec les actes, comme en témoigne la collecte du Livret A en janvier. L'indicateur reste néanmoins loin des valeurs atteintes au lendemain de l'élection d'Emmanuel Macron : 108 points en juin 2017, au-dessus de sa moyenne au long cours (100).