Comment annuler la vente d'un bien ?
Tout achat immobilier passe par l'étape du compromis de vente. Cet acte qui engage les deux parties, acheteur et vendeur, contient une condition suspensive de prêt qui permet d'annuler la vente en cas de non-obtention du crédit à la date prévue. Cette condition peut-elle être mise en jeu par l'une ou l'autre des deux parties ?
Condition suspensive de prêt
Le compromis de vente est un avant-contrat qui engage le vendeur et l'acheteur. Chacun fait une promesse à l'autre, l'un de lui vendre son bien immobilier, l'autre de lui acheter, aux conditions générales et particulières prévues dans cet acte, qu'il est préférable, bien qu'il soit possible de le faire directement entre particuliers, de signer devant notaire.
Parmi les conditions, la plus connue est la clause suspensive de prêt, celle qui conditionne l'achat du bien à l'obtention du financement. L'acheteur qui ne peut décrocher le crédit aux conditions précisées dans le compromis (montant, taux maximal, durée) peut ainsi se dédire sans perdre l'acompte de 10% ni s'acquitter de pénalités. Cette condition suspensive est limitée dans le temps, au minimum un mois (délai légal), mais les deux parties peuvent décider d'un commun accord de le porter à 45 voire 60 jours pour permettre à l'acheteur de décrocher l'offre de prêt adaptée. Passé ce délai, le contrat translatif est caduque, et le vendeur peut décider de remettre son bien sur le marché. Pour échapper aux pénalités, il faut toutefois que la volonté de l'acheteur ne soit pas la cause déterminante et exclusive de la non-obtention du prêt.
Protéger l'acheteur
La condition suspensive de prêt protège l'acheteur et indirectement le vendeur, mais seul le premier peut l'invoquer, comme vient de le rappeler la Cour de cassation. L'affaire remonte à fin 2005 : un acheteur avait obtenu l'offre de prêt servant au financement du bien convoité après la date prévue dans le compromis de vente. Le vendeur avait alors refusé de vendre le bien au motif que le crédit n'avait pas été obtenu à temps. Après réclamation de la vente forcée par la justice, l'acheteur avait été débouté par la Cour d'appel de Paris. Le 27 octobre dernier, la Cour de cassation revenait sur ce jugement, rappelant que la condition suspensive est stipulée dans l'intérêt exclusif de l'acheteur et que le vendeur ne peut invoquer la caducité du compromis de vente du fait du non respect du délai prévu par la condition suspensive. Ce n'est pas la première fois que la jurisprudence règle des litiges relatifs à la condition suspensive de prêt ; en juillet 2014, la Cour de cassation avait rendu un arrêt affirmant explicitement que cette condition est édictée uniquement dans l'intérêt de l'acheteur-emprunteur et que lui seul peut s'en prévaloir.
réf/Cour de cassation, 3ème chambre civile, 27 octobre 2016, pourvoi n°15-23727
Par Sébastien Porret, le mardi 14 mars 2017