18/02/19

Fermeture du Crédit Foncier : les primo-accédants risquent d'en pâtir

Vendredi 15 février, le Crédit Foncier, société créée en 1852, a définitivement baissé le rideau. Les ménages primo-accédants ont représenté ces dernières années 70% des clients financés par l'organisme. Sa fermeture est une mauvaise nouvelle pour ce type de clientèle, également pour les investisseurs qu'aucun autre établissement bancaire n'est en mesure ou n'a le souhait de financer.

Acteur historique du crédit immobilier aux particuliers

Le Crédit Foncier a été durant de longues années un acteur majeur du financement immobilier en France. Créé sous Louis-Napoléon Bonaparte, l'ex-Crédit Foncier de France est, en 1868, la première banque de dépôt du pays, devenant rapidement le premier prêteur des collectivités locales. En 1945, il participe à la reconstruction, gérant le Fonds national pour l'amélioration de l'habitat mis en place par l’État et en 1965, il est chargé par l’État de verser les primes d'épargne logement. C'est son rôle dans la distribution des crédits immobiliers aux particuliers qu'on retiendra. Depuis la fin des années 70', le Crédit Foncier finance les prêts aidés (Prêt à l'accession à la propriété, Prêt locatif aidé, Prêt conventionné, PTZ). Le Crédit Logement, principal organisme de cautionnement des prêts immobiliers, a par ailleurs été créé en 1975 grâce à la participation du Crédit Foncier. 

La crise de l'immobilier des années 1990 annonce les premières difficultés, amplifiées par la perte du monopole de distribution du Prêt à l'Accession à la Propriété (PAP). Ce dernier est remplacé par le Prêt à Taux Zéro (PTZ), qui peut alors être commercialisé par l'ensemble des établissements bancaires. La restructuration se met en place en 1998 ; un an plus tard, le Crédit Foncier rejoint le groupe Caisse d’Épargne qui va bientôt se rapprocher du groupe Banque Populaire. Fin juin 2018, la nouvelle entité BPCE annonce la fermeture du Crédit Foncier, faute de rentabilité suffisante. C'est chose actée depuis le 15 février. BPCE va dorénavant progressivement intégrer les différentes activités de l'organisme. Le démantèlement de la banque aura coûté plus de 335 millions d'euros à BPCE. Le Crédit Foncier présentait fin 2017 un portefeuille de crédits de 114 milliards d'euros qu'une direction dédiée est désormais chargée de gérer.

Inquiétude des courtiers

La disparition du Crédit Foncier génère quelques interrogations chez ses partenaires. Promoteurs et courtiers déplorent l'extinction d'un spécialiste du crédit immobilier qui offrait des solutions de financement à des profils d'emprunteurs qu'aucun autre établissement n'acceptait. Pour le courtier Vousfinancer.com, "dans le contexte actuel de réduction du PTZ, suppression des APL accession et hausse des prix de l’immobilier, la disparition de cet acteur du financement risque de pénaliser encore une fois les ménages les plus modestes". Même préoccupation chez le courtier Cafpi qui s'inquiète par ailleurs du futur financement des SCPI (Sociétés Civiles de Placement Immobilier), le Crédit Foncier étant le seul établissement sur ce segment. Leader également du financement de l’investissement Pinel avec près de 25% de parts de marché, le Crédit Foncier proposait une offre souple et adaptée dont la disparition, si BPCE ne conserve pas la pratique, pourrait desservir les investisseurs et avoir un impact négatif sur toute la filière de l'immobilier neuf. 

On pense évidemment aux constructeurs de maisons individuelles, habitat prisé des primo-accédants qui peuvent le financer via le PTZ. Le Crédit Foncier faisait montre d'une grande expertise dans le marché de la maison individuelle. Sa disparition risque d'affecter encore plus un marché du neuf qui se dégrade depuis six mois. Selon un courtier, en dépit de taux d'intérêt bas et des efforts entrepris par les banques pour resolvabiliser les primo-accédants, bon nombre de ménages modestes risquent de "ne pas trouver de banque pour se financer, car cette clientèle n'est pas rentable". Le groupe BPCE a néanmoins prévu de reprendre le montage et la distribution des prêts sociaux et en particulier des Prêts à l'Accession Sociale dans les Banques Populaires et dans les Caisses d’Épargne. Les courtiers ont ici une carte à jouer, en se positionnant sur le montage des dossiers difficiles auprès des banques généralistes.


Gerard Mihranyan

Par , le lundi 18 février 2019


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