8/02/19

Immobilier : Emmanuel Macron se dit favorable à une surtaxation immobilière

Taxer la plus-value sur la résidence principale, un chiffon rouge agité par les gouvernements actuel et précédent, qui excite les médias, agace les professionnels de l'immobilier et enrage les Français. Dans un débat public fin janvier, le président de la République a évoqué la piste d'une révision de la fiscalité immobilière.

Taxer ces "horribles" propriétaires

A l'occasion d'une rencontre publique à Bourg-de-Péage le 24 janvier dernier, Emmanuel Macron a relancé l'idée d'une surtaxation de l'immobilier. Interpellé par un intervenant qui proposait de mieux réguler certaines plus-values immobilières, le président de la République a répondu que son idée "est très bonne". Il a pris pour exemple Bordeaux où l'arrivée du TGV a permis à de nombreux propriétaires de réaliser de belles plus-values de cession, une "injustice" en faveur de ceux qui "n'ont pas travaillé pour ça". Sont bien sûr concernées en priorité les résidences principales, pour lesquelles les plus-values à la revente sont exonérées. Emmanuel Macron s'est dit favorable à autoriser les collectivités à imposer les plus-values immobilières, tout en précisant qu'il ne pourrait s'agir de politique fiscale nationale.

Il n'en fallait guère plus pour ranimer les braises d'une taxation de la résidence principale. Le feu couve depuis l'ère Sarkozy. A l'époque, il était question de taxer les revenus locatifs virtuels de la résidence principale. Devant la polémique suscitée, le gouvernement avait renoncé à une mesure qui aurait constituée une double peine pour les propriétaires qui s'endettent de longues années pour acquérir le seul bien de leur vie. Rassurons-nous, pour l'heure, les ministères des Comptes publics et du Logement affirment qu'aucune réforme de la fiscalité immobilière n'est en préparation.

La fiscalité immobilière française, une exception nationale

La France est, parmi les pays de l'OCDE, celui qui taxe le plus lourdement la détention immobilière (impôts fonciers et impôts sur les transactions). Seuls les États-Unis et le Royaume-Uni font pire. Au Luxembourg et en Hongrie, l'impôt sur le patrimoine porte uniquement sur les sociétés. En France, on taxe sur tous les tableaux : le capital, les cessions et les revenus locatifs, sans oublier les droits de succession.

D'abord la taxe foncière, calculée sur des bases datant de 1970, déconnectées de la réalité du marché. Si le logement est loué, le bailleur paie des impôts sur les revenus issus des loyers, puis des droits de mutation à la revente (taux forfaitaire de 19% + prélèvements sociaux au taux de 17,2%). Et enfin les droits de succession qui varient en fonction de l'importance de l'héritage et du degré de parenté. N'oublions pas non plus l'IFI qui remplace l'ISF et qui cible désormais uniquement l'immobilier.

En janvier 2018, un rapport du Conseil des prélèvements obligatoires, organisme placé auprès de la Cour des Comptes, alertait sur la hausse du niveau des prélèvements portant sur le patrimoine des ménages sur la dernière décennie. En France, les prélèvements sur le capital, ménages et entreprises confondues, représentent 23,5% des prélèvements obligatoires contre 21,6% en moyenne européenne ; ils comptent pour 11% dans le PIB, soit 2,4 points de PIB au-dessus de la moyenne européenne. Après l’Italie, la France est le deuxième État membre où les prélèvements sont les plus élevés. Les chiffres suivants en disent long sur le matraquage fiscal à la française entre 2006 et 2016 :

  • hausses de la taxe foncière : +9 Md€, soit +82 %, 
  • hausse des prélèvements sociaux : +6,3Md€, soit +48%
  • hausse des droits de mutation à titre onéreux : +4,5Md€, soit +55 %.

Ces augmentations expliquent à elles seules les quatre cinquièmes de l’accroissement du rendement de l'imposition des revenus sur la période.

Les professionnels sont d'accord sur un point : toute la fiscalité immobilière est à revoir, car elle est non seulement injuste mais inefficace. Certains souhaiteraient une taxation portant uniquement sur la détention des biens, exonérant les transactions pour fluidifier le marché. Les récents propos d'Emmanuel Macron vont ajouter encore plus le trouble sur un système que beaucoup qualifient d'"usine à gaz" comme l'est le régime d'imposition dans notre pays.


Gerard Mihranyan

Par , le vendredi 8 février 2019


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