Parer les arnaques quand on fait construire
Faire construire sa maison est un rêve qui peut vite tourner au cauchemar quand les problèmes s'accumulent : retards dans les travaux, malfaçons, surcoûts, abandon de chantier, matériaux au rabais,...voici comment se prémunir contre des professionnels sans scrupules.
Les garanties qui vous protègent
Chaque intervenant sur un chantier engage sa responsabilité dont le champ varie selon sa fonction. En tant que maître d'ouvrage, vous confiez la construction de votre maison directement à un constructeur de maison individuelle, ou vous choisissez de faire appel à un intermédiaire, le maître d'oeuvre (architecte par exemple), dont la mission est d'élaborer les documents techniques, de choisir les entreprises du bâtiment, de coordonner les travaux et de réceptionner le chantier. Un contrat lie les deux parties, à savoir le maître d'ouvrage (vous-même) et le professionnel :
- un contrat de construction de maison individuelle (CCMI)
- ou un contrat de maîtrise d'oeuvre.
Il est impératif d'exiger du professionnel une attestation de garantie décennale qui est l'assurance essentielle en construction. Elle garantit la réparation des dommages qui se produisent dans les dix ans après la réception des travaux sans attendre une décision de justice. Cette assurance doit également être souscrite par tout autre prestataire intervenant sur le chantier (artisan, entrepreneur). En tant que maître d'ouvrage, vous devez souscrire en parallèle une assurance dommages-ouvrage dont l'objet est d'intervenir en préfinancement des dommages de nature décennale.
La garantie décennale concerne le gros oeuvre (murs, charpente, toiture,...) et doit être souscrite avant le démarrage des travaux. Elle ne doit pas être confondue avec la garantie biennale qui impose à tout intervenant (constructeur, maître d'ouvrage, artisan) de réparer ou remplacer tout équipement défectueux dans les deux ans qui suivent la réception du chantier. Le constructeur, l'entrepreneur ou l'artisan est également soumis à la garantie de parfait achèvement qui l'oblige à réparer tout désordre signalés au cours de l'année qui suit la réception des travaux.
Le contrat de construction de maison individuelle (CCMI)
Le CCMI a été conçu pour vous protéger des constructeurs peu scrupuleux. Il s'impose à tout constructeur qui se charge des travaux de mise hors d'eau (couverture et étanchéité) et hors d'air (fenêtres et portes). Le CCMI doit lister de manière exhaustive tous les matériaux que vous commandez, avec, pour chacun d'entre eux, les caractéristiques précises (qualité, dimensions, couleur, marque, référence,...). A la fin du chantier, vous pourrez vérifier si l'élément est conforme au contrat. Refusez la mention "équivalent" au risque de vous retrouver avec une série d'équivalents qui cachent une tromperie sur les matériaux.
En plus d'être assuré en garantie de responsabilité professionnelle et décennale, le constructeur doit être titulaire d'une garantie de livraison souscrite auprès d'un assureur ou d'un établissement de crédit, et d'une garantie de remboursement quand le CCMI, conclu avec fourniture de plan, prévoit des paiements avant l'ouverture du chantier.
Le constructeur engage sa responsabilité quant à la livraison dans les délais et aux prix convenus au contrat. Tout retard lié à des travaux prévus au contrat entraîne des pénalités qui s'appliquent dès le premier jour de retard. Le montant minimum des pénalités de retard est de 1/3000e du prix de la construction par jour. Elles doivent être payées dès le premier jour de retard si celui-ci est supérieur à 30 jours et peuvent être réclamées directement auprès de l'organisme qui s'est porté caution pour la garantie de livraison.
À noter : une livraison dans les temps ne peut pas être exigée en cas de force majeure (accident de chantier ou intempéries).
Bon à savoir : le constructeur n'est pas tenu d'inscrire une date de livraison précise. Il peut indiquer un délai comme « fin du 3e trimestre ». Le retard ne sera effectif que si la période mentionnée est dépassée.
Dépassement de budget
Le CCMI fixe un prix pour votre maison, mais en raison de la durée du chantier, il est possible que les coûts liés à la construction évoluent (charges et salaires, prix des matériaux, frais d'énergie). Le CCMI prévoit généralement une clause de révision du prix du bien. Le constructeur doit obligatoirement se baser sur l'indice BT 01 révisé chaque mois par l'Insee puis publié au Journal Officiel. C'est l'indice datant de quatre mois qui sert de référence.
La révision du prix peut se faire en une seule fois ou à chaque échéance de paiement, la première formule étant la plus répandue.
La réception des travaux
Moment tant attendu, la réception des travaux est un temps décisif pour l'application des garanties qui vous protègent. Pensez à être accompagné d'une personne compétente lors de la visite de réception afin de détecter la moindre anomalie. Si vous constatez des défauts ou malfaçons, vous pouvez refuser la réception ou l'accepter en émettant des réserves. Dans les deux cas, vous avez le droit de consigner au maximum 5% du prix des travaux jusqu'à réparation des désordres. L'argent est mis sous séquestre chez un notaire ou à la Caisse des Dépôts.
Bon à savoir : l'Aamoi (Association d'aide au maîtres d'ouvrage individuels) assiste tout particulier qui souhaite faire construire sa maison individuelle. Son rôle est d'accompagner le maître d'ouvrage dans son projet de construction, de la préparation à la signature du CCMI, dans le suivi du chantier, et d'intervenir en cas de litige avec le constructeur. Le coût de l'adhésion est de 90€ par mois. Attention, l'Aamoi s'est vu retirer son agrément provisoirement le 24 avril 2018.
Par Gerard Mihranyan, le mardi 9 octobre 2018