Crédit immobilier : un marché en demie teinte qui favorise les bons profils
Les médias ne cessent de rapporter que les conditions d'emprunt sont toujours favorables et que les taux, maintenus à des niveaux très bas, permettent au plus grand nombre de réaliser leur projet immobilier. La réalité est plus nuancée. Les taux restent faibles, mais les prix des logements ont nettement augmenté. La politique du logement est par ailleurs moins généreuse en 2018. En sortent gagnants les bons profils, cible privilégiée des établissements de crédit.
Des conditions de financement toujours performantes
Les taux d'intérêt des crédits immobiliers sont bas depuis deux ans. En dépit d'une légère remontée en décembre dernier, les valeurs restent proches des minima historiques. Les courtiers en crédit arrivent à négocier des taux largement inférieurs à 2% sur la durée de 20 ans. Les professionnels l'assurent : les conditions d'octroit restent les mêmes, aucun ressserrement n'est constaté, mais les priorités ont changé.
Les meilleurs profils sont privilégiés. A eux les meilleures conditions de financement, en premier lieu des taux nettement inférieurs aux moyennes du marché. Des décotes de 50 points ne sont pas rares. A l'opposé, les candidats à l'emprunt les plus fragiles se trouvent désolvabilisés par la hausse des taux sur cette clientèle à risques et par l'inflation des prix des logements, tout particulièrement dans les grandes métropoles.
Rabotage des aides à l'accession
La politique du logement est l'autre variable aléatoire qui influe sur les capacités d'emprunt. La loi de finances 2018 supprime l'APL accession dans le neuf, un dispositif plutôt méconnu qui permet aux emprunteurs les plus modestes d'accéder à la propriété. Il s'agit d'une aide publique qui est versée directement à la banque prêteuse et qui permet ainsi de réduire les mensualités de l'emprunteur. Cette aide financière peut représenter jusqu'à un quart des mensualités, voire la moitié dans certains cas. 50 000 ménages en profitent chaque année, autant d'emprunteurs qui n'auraient pu acheter leur logement dans des conditions classiques car leur taux d'endettement dépassait le seuil communément admis (33%). L'APL accession est maintenu dans l'ancien, mais uniquement dans les zones détendues et pour deux ans. Or sur les 50 000 opérations réalisées grâce à ce dispositif, un tiers d'entre elles concernaient le neuf. Plusieurs dizaines de milliers d'opérations seront donc irréalisables cette année. Cette décision pourrait être contre-productive pour les finances publiques. En effet les bénéficiaires potentiels de l'APL accession sont aussi éligibles à l'APL locatif, dispositif qui coûte 70% plus cher à l'Etat.
Aide majeure à la primo-accession, le PTZ (prêt à taux zéro) est lui aussi recalibré. Reconduit dans les zones tendues pour quatre ans pour l'achat d'un logement neuf, il est maintenu en zones B2 et C uniquement pour deux ans, et voit sa quotité diminuer de moitié (20% au lieu de 40%). Il disparaît dans l'ancien dans les zones tendues.
Par Hervé Labatut, le jeudi 25 janvier 2018